GÉOPOLITIQUE
 
Les frontières

 

Quand on aborde la question des frontières dans le Bassin Caraïbe on est comme presque toujours confronté à la dichotomie espace insulaire / espace continental. La plupart des tracés sont récents à l’échelle historique deux siècles tout au plus, mais souvent 100 ans, voire moins. Les frontières ont accompagné les indépendances au début du XIXe siècle pour les pays de l’Isthme et ceux du nord de l’Amérique du Sud ; c’est au tournant des années 1850 que la frontière américano-mexicaine a été définie après l’achat et les guerres du Texas et de la Californie. Parfois les conflits armés ont joué un rôle dans la délimitation comme ce fut le cas entre Haïti et la République Dominicaine qui ont permis à la Première république noire de gagner 25% de son territoire actuel. Dans le reste de la Caraïbe insulaire les litiges, les tensions relèvent avant tout du droit maritime, ou dans quelques rares cas des tentatives de sécession de certaines îles comme Tobago qui revendique une dose d’autonomie par rapport au gouvernement de Trinidad.

Sur le continent, cette histoire récente et des conditions physiques chaotiques provoquent soit des incertitudes, parfois des revendications territoriales et à l’extrême des tensions avec démonstrations de force. Cela n’a rien de surprenant car une frontière résulte le plus souvent d’un processus en trois étapes : « l’allocation d’un territoire, la délimitation et enfin la démarcation par le bornage »1 sauf dans quelques situations exceptionnelles. Les environnements orographiques, climatiques compliquent dans la zone les tracés frontaliers et contribuent à entretenir le flou sur certaines limites. Dans ces conditions les villes frontières de la plupart des états sont peu nombreuses, et même rares dans la partie orientale des pays de l’Isthme, de plus de petite taille. Les échanges transfrontaliers existent mais n’ont pas généré de réelles activités économiques d’envergure sauf dans quelques cas exceptionnels comme la frontière entre le Mexique et les États-Unis.

1. La construction des frontières

1.1. Tentatives de créations de grandes entités

Au début du XIXe siècle, les élites créoles blanches des colonies espagnoles revendiquent presque sur tout le continent américain, leur indépendance. L’accession à la pleine disposition de leur destin des Treize colonies nord-américaines, la Révolution française constituent des modèles. La plupart des dirigeants des mouvements indépendantistes ont fait leurs études sur le vieux continent et donc ont été en contact avec les écrivains du Siècle des Lumières à l’instar de Simon Bolivar, voire ont combattu dans les armées révolutionnaires françaises comme Francisco De Miranda, leader de la première guerre d’indépendance du Venezuela contre la monarchie ibérique (1811). Leur idéal est celui de grandes nations qui donneraient la parole au peuple sans que celui-ci ne soit clairement défini. La grande majorité des élites urbaines issues du monde hispanique aspire à la maîtrise des affaires mais n’est pas prête à partager le pouvoir avec les péons, paysans plus ou moins métissés conservant les traditions et les cultures du monde amérindien.

 

Francisco De Miranda (1750-1816)

Francisco de Miranda est né à Caracas dans une riche famille de négociant. Son père était ostracisé par les élites créoles de la ville car originaire des Canaries, donc peut-être de sang mêlé.

Francisco est un homme du XVIIIe : il s’engage dans l’armée espagnole en achetant une charge à 22 ans, part faire des études militaires à Cadix, découvre l’Europe et ses intellectuels. L’armée lui procure grade et notoriété Il peut ainsi rajouter la particule noble à son nom et devient « De Miranda ».

Il effectue plusieurs séjours militaires en Afrique du Nord pour la couronne. Durant ces années, il lit beaucoup, s’intéresse aux idées révolutionnaire. Il est envoyé à Cuba pour réprimer des révoltes mais accusé de trahison doit quitter l’armée. Il parcourt alors les États-Unis, l’Europe, rencontre, Catherine II de Russie des ministres britanniques qui ont une obsession, amoindrir l’influence ibérique en Amérique, participe à la bataille de Valmy avec le grade de Général.

En 1810, il retourne au Venezuela et provoque un soulèvement qui échoue. Trahi, il est arrête avec la complicité de Bolivar, et envoyé en prison à Cadix Il y meurt sans voir l’indépendance de son pays mené par Bolivar. Au Venezuela on lui donne le titre de « Précurseur ».

En 1821 est proclamé l’indépendance de la Grande Colombie, mais celle-ci se disloque très vite et trois États émergent : le Venezuela, la Colombie proprement dite et l’Équateur. Ce n’est qu’en 1941 que la frontière entre Venezuela et Colombie est fixée soit plus d’un siècle après la proclamation des indépendances. Preuve s’il en est que tracé une ligne qui fixe la souveraineté des États n’est pas chose aisée. Les indépendances du Mexique, du Guatemala, et du Honduras poussent logiquement à la création d’un État centre-américain qui éclate lui aussi très vite, le gouvernement du Général Iturbide provoquant la sécession des provinces du sud du Mexique. Les frontières de ces différents États ne seront reconnues par les diverses entités concernées qu’à la fin du XIXe voire au XXe siècle.

 

Augustin Cosme De Iturbide (1783-1824)

Né en 1783 à Morella , état du Michoacan, de parents nobles originaires de Navarre et Biscaye, installés en Nouvelle Espagne au début des années 1770. C’est donc un créole de l’élite sociale de la Monarchie ibérique. Comme beaucoup de jeunes de son milieu social il s’engage dans l’armée et accède au rang de lieutenant en 1810.

Le Mexique connaît une série de révoltes à partir de 1810 en réaction à l’invasion de la Péninsule par les troupes de Napoléon. Iturbide combat dans les rangs des armées de la monarchie avec une réelle efficacité, mais en 1820 s’engage au côté des indépendantistes avec le grade de Général

En 1821, présente avec Guerrero un autre leader indépendantiste le plan de Iguala qui envisage un état séparé de l’Espagne. L’armée espagnole est vaincue et Iturbide devient membre de la junte qui gouverne le nouvel état ; celui-ci dédommage les anciens grands propriétaires qui ont préféré regagné la Péninsule Ibérique . Cette décision provoque la banqueroute du jeune état mexicain mais n’empêche pas le camp des créoles conservateurs d’établir un régime monarchique. En juillet 1822, Iturbide se fait proclamer Empereur sous le titre de Augustin 1er ; en cela il a pris pour modèle Napoléon.

Il instaure un régime très autoritaire qui ne dure que 18 mois, s’enfuit en Europe, et provoque la sécession des provinces du Sud qui deviennent à leur tour indépendantes. Iturbide tente de revenir au Mexique en 1824, arrêté il est fusillé.

À titre d’exemple on peut citer le cas de la frontière entre le Mexique et le Guatemala qui conviennent d’une délimitation en 1882 qui ne sera achevée qu’en 1889. Sur les cartes apparaît alors la séparation entre Soconusco et Chiapas donc entre indiens Keckchi et Tzoltzil

1.2. L’État-nation, une utopie

Si les élites blanches créoles sont le moteur des indépendances, elles sont numériquement très minoritaires et essentiellement urbaines. Or les villes sont en petit nombre eu égard aux superficies, d’un poids démographiques dérisoire à part Mexico qui compte au XVIe siècle 250 000 ou 300 000 habitant. Dans le reste de l’isthme, Trujillo porte d’entrée du Honduras ne compte que 20 familles d’origine espagnole ce qui fait à peine 150 personnes. Au Costa Rica à la veille de l’indépendance on recense 80 familles à Cartago sur 8 000 habitants soit à peu près 300 à 400 personnes. Le reste des populations est soit profondément métissée, soit constituée d’ethnies amérindiennes ( mayas, garifunas, miskitos… ) car si les peuples premiers ont subi un très grave choc démographique au moment de l’arrivée des Européens (baisse de 80% dues aux guerres, exactions, crimes et luttes en tous genres ce sont surtout les épidémies dont elles n’étaient immunisées qui les ont décimées), elles ont su cependant se reconstituer, perdurer et se développer. Dans l’isthme, elles ont trouvé refuge dans les forêts denses sempervirentes ou dans les mangroves de la côte basse de la mer Caraïbe ; elles ont résisté à l’envahissement, à la domination coloniale comme ce fut le cas des derniers Mayas du Royaume de Tayassal qui ne furent définitivement vaincus qu’en 1697 soit 170 après l’arrivée des Espagnols2. Beaucoup d’historiens se sont penchés sur « La guerre de Cent ans » qui opposa les royaumes d’Angleterre et de France, mais cette âpre lutte pour la survie sur les continents américains est restée en grande partie dans l’ombre et sans doute devrions-nous trouvé d’autres cas similaires. Cette résilience, ces luttes montrent à quel point un nombre important d’Amérindiens a tenté de rester à l’écart de la colonisation. Les couches supérieures, surtout urbaines aztèques ou mayas ont pu se mélanger et participer à la vie des nouveaux arrivants qui n’auraient d’ailleurs pas survécu sans leur aide, la grande majorité a continué à vivre selon ses propres rythmes, et traditions3.

1.3. Les tracés : un héritage historique de l’organisation des possessions espagnoles

S’il n’y avait pas de sentiment national développé, ce sont les limites de partages antérieurs liés à la domination de l’Espagne qui ont servi à un découpage ultérieur. Les limites en étaient floues, les différents pouvoirs se sont affrontés, mais à partir de là des territoires ont émergé, des frontières ont été dessinées sur des cartes car nous verrons que dans la réalité les choses ont été beaucoup plus compliquées. Les grandes structures ont d’abord été les vice-royautés qui ont été divisées en circonscriptions moins étendues, pour permettre un contrôle des populations : sont apparues les capitaineries et les Audiencias de moindre envergure et de compétences plus réduites. Dans la zone qui nous concerne il existait deux vice-royautés, la Nouvelle Espagne dont le centre était Mexico, et celle de Nouvelle Grenade qui a produit l’éphémère Grande Colombie (Venezuela, Colombie et Équateur).

La Nouvelle Espagne était divisée en capitaineries dont la plus importante fut la Capitainerie Générale du Guatemala dont l’autorité s’étendait sur les États actuels du Guatemala, du Belize, du Honduras, Salvador, Nicaragua et Costa Rica. C’est donc une superficie de près de 430 000 km² qui était sous le contrôle d’un homme et d’une administration faiblement constituée. À un niveau inférieur il existait les Audiencias qui se sont structurées autour d’une ville comme Tegucigalpa ou San José. Ces circonscriptions avaient une fonction uniquement juridique : là se réglaient les contentieux entre personnes, les actes délictueux. On peut remarquer que les Audiencias couvraient tout de même des superficies importantes et donc l’emprise, les règles qui prévalaient en Espagne n’avaient pas forcément cours dans l’isthme centre-américain. Les grands propriétaires et leurs hommes de main, maintenaient un ordre qui était le leur sans beaucoup d’égards pour les paysans.

2. Délimitations et appropriations des territoires

2.1. Un siècle de contestations et de traités

Ce sont ces anciens découpages qui ont prévalu lors de l’émergence des États car les Créoles ont tente de préserver leur emprise sur les terres et les hommes, mais comme celle- ci était faible, quoi qu’on ait pu en dire eu égard au nombre de blancs créoles, le tracé des frontières est resté approximatif. Au cours du XIXe siècle cette situation a donné lieu à des tensions, des guerres et des rectifications. Ainsi en suivant les chiffres avancés par Michel Foucher, on constate que 30% des tracés reprennent des délimitations antérieures au XIXe siècle et 10% sont postérieurs à 1914, date d’ouverture du Canal de Panama. On peut donc conclure que 60% des tracés frontaliers ont été déterminés entre 1821 et 1914. Dans cette zone les modifications ont donc été mineures.

Sur les 38 dyades (frontières) 14 l’ont été suite à des arbitrages internationaux. Ce sont souvent des souverains ou des responsables politiques européens qui ont joué le rôle de médiateurs entre deux entités. Le tsar Alexandre III obtient la fixation de la frontière entre la France et les Pays-Bas sur le fleuve Maroni entre Guyane et Surinam. En 1900, le Président de la République Française, Émile Loubet contribue à l’acceptation par le Costa Rica et la Colombie de la souveraineté de cette dernière sur les îles plus ou moins proches du littoral (exemple : l’île de San Andrès qui passe sous l’autorité colombienne. Pourtant cette limite a été jusqu’à aujourd’hui source de revendications). En 1906, c’est la frontière entre le Nicaragua, indépendant depuis 1836, et le Honduras qui est affirmée le long du fleuve Coco, après la médiation du roi d’Espagne Alphonse XIII. Enfin, dernier exemple, en 1941 la frontière entre la Colombie et le Venezuela longue de 2 219 kms lors du traité Lopez de Mesa est établie. Dans l’archipel, il y eut peu de difficultés La seule limite erratique fut celle de Haïti et de la République Dominicaine ; celle là a vu sa superficie multipliée par deux en 250 ans. Un dernier acteur a joué un rôle considérable dans la délimitation des frontières. Sans surprise ce sont les États-Unis puisqu’ils sont à l’origine de 46% des tracés, Ils ont agi très souvent par pression surtout pour défendre les intérêts des grandes compagnies bananières ou donner naissance au Panama au détriment de la Colombie.

2.2. Un imbroglio géographique

Les conditions orographiques et climatiques essentiellement biogéographiques constituent la plupart du temps des obstacles à la fixation des frontières entre deux États, en particulier au tracé lui-même, et au bornage. Dans la partie occidentale de l’isthme centre-américain on se heurte à des massifs montagneux dont la direction longitudinale ne favorise pas des limites nettes : les chaînes ont majoritairement une direction nord-est / sud-ouest tandis que les frontières ont des tracés ouest / est. La ligne de démarcation pourrait suivre les crêtes des blocs soulevés ou les vallées des effondrements tectoniques mais la région voit s’affronter les plaques tectoniques comme celles des Cocos, Nazca et des Caraïbes, du Pacifique et dans le cas présent avec un effet moindre celle de l’Atlantique. Ce jeu des plaques donne naissance à une intense activité sismique (séisme de magnitude 7,1, le 17 septembre 2017 suivi d’une réplique de même intensité le 22 septembre au sud de Oaxaca au Mexique) et volcanique. Or souvent les volcans sont situés à proximité des frontières comme le Tajulmaco (4 220 m) à moins de 20 kms de la frontière mexicano-guatémaltèque ; dans le secteur on trouve aussi, sur la limite elle-même le Tacama (4 091 m). Ces constructions sont encore fortement actives, et leurs coulées peuvent modifier des tracés. À cela on peut ajouter, de manière plus récurrente les coulées de boues provoquées par les intenses pluies tropicales de l’hivernage.

Partout, dans les États centre-américains, sauf pour le nord du Mexique qui est une région semi désertique voire désertique, dominent des biotopes denses : forêts humides sempervirentes, tropicales ou équatoriales. Ces zones peu peuplées restent difficiles à contrôler. La longue frontière de 2 219 kms entre le Venezuela et la Colombie ou entre le Venezuela et le Brésil est celle de la forêt dense. Le seul milieu tangible qui peut servir de frontière est le cours d’eau ou les rares crêtes montagneuses. C’est paradoxalement le piémont de la Sierra Perija et non la ligne de crêtes, qui constitue la limite entre Venezuela et Colombie au nord. Au sud celle-ci suit le fleuve Arauca et une grande partie du Rio Negro. Mais une difficulté apparaît car les noms pour une même rivière peuvent changer et il est parfois difficile de déterminer ce qui relève du tracé majeur ou d’un affluent. Un cas exemplaire de flou dans les limites des souverainetés nationales est celle de la mort de deux gendarmes français en Guyane, tués lors d’affrontements avec des orpailleurs clandestins. Le principal suspect est brésilien est prétend s’être trouvé sur son territoire national ; le Brésil a refusé de l’extrader.

Au total on constate que les fleuves et les cours d’eau contribuent pour l’essentiel au tracé des frontières ; ils représentent 60% des limites.

Dans la partie orientale de l’isthme, la topographie est celle d’une vaste plaine à mangrove ; c’est un immense marécage qui évolue au gré de la croissance de la végétation et des marées. L’exemple le plus caractéristique est celui du « Bouchon de Darien » vaste zone de 160 kms de long et 80 de large à cheval sur la Panama et la Colombie qui se présente comme une plaine marécageuse au sud et une région de montagnes au nord (côté panaméen) qui culmine à 1 700 mètres, couverte d’une dense forêt sempervirente. C’est la seule région sur le continent qui ne comporte aucune infrastructure routière : l’autoroute pan américaine ne la traverse pas : il y a une interruption de près de 100 kms entre Yaviza bourgade de 1 700 habitants, chiffre stable depuis 30 ans, au nord et Lomas Aisiadas au sud. Les seuls moyens de déplacement dans le secteur sont les canots sur les rivières et l’avion. Le bouchon de Darien a aussi été réputé pour abriter des groupes armés comme les Farcs qui le traversaient à pied sans encombre et les narco trafiquants dont il reste ça et là quelques villas abandonnées ; la région est réputée pour être une des plus dangereuse au monde4. Pour passer de Colombie au Panama le plus simple est d’emprunter le bateau pour une traversée de 10 à 12 heures. Dans ces conditions le tracé frontalier est théorique, car comment établir des bornes qui seront avalées par la végétation en quelques mois, alors que les densités humaines dans la zone sont inférieures à 1habitant par kilomètre carré.

Photo 1 : Le bouchon de Darien, quand la nature reprend ses droits sur les tracés des frontières

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Source : voyage-colombie.com
Tableau n°1 : Frontières terrestres et frontières fluviales

Pays concernés

Fleuve

Longueur totale du fleuve - frontière

États-Unis / Mexique

Rio Grande Del Norte

2 018 sur 3 200 au total

Mexique / Guatemala (Ouest)

Suchiati

161

Mexique / Guatemala (Chiapas)

Usumacinta

310

Guatemala / Honduras

Rio Montaga

256

Honduras / Salvador

Rio Goasgaran

256

Honduras / Nicaragua

Rio Coco

342

Nicaragua / Costa Rica

San Juan

192

Costa Rica / Panama

Sixaola

146

Colombie / Venezuela / Brésil

Rio Negro

2 250

Sources : Encyclopedia universalis, Atlas du monde, 2018.

2.3. La maîtrise du territoire, une affaire de militaires

La frontière permet à un état de marquer les limites de sa souveraineté. Après « l’allocation » effective de terres, les militaires assurent la présence réelle de l’État. La frontière est alors l’objet de la multiplication de forts, de villes - militaires (casernes, concentrations de matériel), de patrouilles qui sont les symboles de la puissance régalienne et donc de la maîtrise de l’espace. Par définition le long de la frontière des armées se font face ; en période de tensions les risques d’affrontements peuvent être accrus. Pendant plusieurs décennies les armées se sont fait face entre le Belize, ancienne colonie britannique, enlevée au Guatemala au XIXe siècle et les troupes guatemaltèques. L’apaisement, la reconnaissance de la frontière ne datent que de quelques années. Les cartes ne formalisent pas encore cet état de fait acquis seulement en 1991 mais le bornage a commencé.

Quelques limites sont encore fortement militarisées. C’est le cas de la séparation entre le Mexique et les États-Unis qui plus que jamais fait la une des médias. Ce ne sont pas tant les infrastructures militaires, les patrouilles que la construction du fameux murs de 2 000 kms envisagée par le Président Trump (à noter qu’une partie de ce mur obstacle voulu à l’immigration de populations de l’isthme, avait été déjà réalisée sous les deux mandats de Barak Obama). Outre l’armée qui contrôle la zone, on observe la multiplication de milices locales plus ou moins officielles quand ce ne sont pas des groupes armés d’autodéfense non contrôlés.

Photos 2&3 : La frontière Mexique -États-Unis

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Sources : wikipedia, grazia, 2018

 

L’autre limite, où l’on peut observer une forte présence militaire est celle de la frontière entre le Venezuela et la Colombie. Le nord, le long du Golfe de Maracaïbo, et autour de la ville de Cucuta à 800 kms au sud de la Caraïbe, sont étroitement surveillés car c’est la partie où les échanges, les passages, les déplacements de population sont les plus denses. Le Sud est le monde de la forêt équatoriale. Pendant longtemps, les groupes armés comme les Farcs ou les escadrons d’extrême droite s’y sont déplacés au gré des affrontements avec l’armée régulière, la forêt vénézuélienne servant de refuge.

3. Des systèmes frontaliers incomplets

Pour que les frontières aient un sens, pour qu’elles se traduisent dans les paysages (bornes, gardes, lieux de passage), il faut que les populations vivant dans leur environnement en aient accepté le tracé et surtout qu’elles reconnaissent la souveraineté d’un état national. Or ce sentiment national est pour le moins problématique.

3.1. L’identité nationale, un leurre dans cette région du monde

Les conditions géographiques, l’empreinte cicatricielle du passé a laissé à l’écart nombre de groupes humains. Créer un sentiment national a longtemps relevé de la gageure. Le Nicaragua a en fait l’amère expérience. Dans les années 1980 lors de la guerre civile sandiniste, des étudiants ont été envoyés de la capitale, vers la région orientale peuplée, de Mosquitos, métis de noirs ayant échappés à l’esclavage et de populations amérindiennes ; Les Mosquitos seraient aujourd’hui environ 180 000 individus. On rencontre encore des garifunas eux aussi issus du monde esclavagiste arrivés sur le continent au XVIIe et XVIIIe siècle, et quelques 10 à 15 000 Mayangnas. Ces ethnies parlent des langues chibcha ou arawak. Jusqu’au XIXe siècle ce sont des groupes semi nomades qui cultivent sur les mornes essentiellement du manioc et qui à la saison sèche s’établissaient sur la côte où ils s’adonnaient à la pêche. Des missionnaires allemands les évangélisent dans la seconde moitié du XIXe contribuant à développer un protestantisme morave qui soude les individus et leur donne une identité par rapport à d’autres groupes. Pour toutes ces populations, l’ennemi peut arriver de la mer comme cela s’est produit lors de l’installation des grandes compagnies bananières qui ont accaparé des milliers de kilomètres carrés ; mais ce sont surtout les paysans pauvres et métissés de l’Ouest, parlant espagnol, chassés de leurs terres par les propriétaires latifundiaires qui ont suscité de violentes oppositions et qui ont été combattus âprement parce qu’ils étaient aussi les plus faibles malgré ou justement à cause du nombre ; à la fin du XXe on estimait qu’ils étaient à peu près 185 000 soit plus que les groupes autochtones. S’opposer aux compagnies bananières qui entretenaient de véritables milices armées et procuraient à l’occasion un travail était quasi impossible mais les paysans pauvres constituaient un bouc émissaire idéal. Le Castillan, langue des vainqueurs, devient celle de l’ennemi que ce soit un paysan, un étudiant venu alphabétiser et soigner les populations et animé des meilleures intentions comme ce fut le cas il y a 30 ans, ou l’État qui prélève des impôts.

Cette situation se retrouve un peu partout en Amérique centrale et dans le Nord de l’Amérique du Sud ; ce n’est qu’à partir des années 2000 avec la paix revenue que des solutions politiques ont pu être mises en place dont la reconnaissance des langues amérindiennes tant au Guatemala qu’au Nicaragua et au Venezuela. La lutte pour le droit des peuples indigènes menée par Rigoberta Menchu, prix Nobel de la paix a rendu populaire cette cause et a imposé plusieurs mesures comme l’autonomie politique de quelques régions orientales, des plans de développement économiques. La frontière existe donc. Mais depuis 20 ans sa perception a changé. Peut être une identité nationale est-elle en train d’émerger bien que cela se fasse très lentement. Pour que le sentiment national soit effectif il faudra que les relations aux villes et surtout aux capitales se multiplient que les échanges y compris internationaux s’intensifient et que l’État apparaisse plus protecteur que prédateur.

3.2. Les villes-frontières

Dans le contexte décrit, elles sont rares sauf sur la limite entre les États-Unis et le Mexique, de petite taille et n’ont guère suscité de grandes activités économiques. En outre, elles sont plutôt concentrées dans la partie ouest de l’isthme et quasiment absentes sur le tiers ou la moitié Est ainsi qu’au sud le long des limites entre le Brésil, le Venezuela et la Colombie. Du nord au sud de la zone, on constate une diminution des postes frontières :

  • Denses, le long de la limite entre les États-Unis et le Mexique on en compte 13 soit un tous les 240 kilomètres ; il faut cependant noter qu’ils sont plus nombreux dans la partie ouest de la frontière. C’est l’ensemble San Diego / Tijuana qui domine avec respectivement 1,4 et 1,3 millions d’habitants. C’est l’ensemble le plus complet. Le long de cette limite sur les 3 000 kms, on a comptabilisé plus de 3 millions de personnes franchissant la frontière chaque jour et 300 000 véhicules. Denses encore à la frontière guatemaltèque, soit un tous les 120 kilomètres ; ils sont localisés sur les deux tiers ouest et centre. La frontière entre le Mexique et le Guatemala est un peu particulière. Pendant longtemps elle n’a eu qu’un rôle mineur Mais l’entrée en vigueur de l’ALENA en 1994, premier marché libre et commun du monde renforce son rôle. Les États-Unis exercent de fortes pressions sur le Mexique pour que celui-ci assure un contrôle minutieux des marchandises et des personnes. C’est en effet par là que passent tous les trafics surtout les passages de drogues et de migrants qui cherchent à atteindre « l’Eldorado » nord américain.
  • Rares en ce qui concernent celles plus au sud : 2 entre Guatemala et Salvador et Guatemala Honduras, il n’y a guère moyen de traverser les frontières dans les parties orientales de l’isthme. Tous les points de passage sont situés à l’Ouest, le plus souvent sur un fleuve.
  • Ponctuelles : dans tout le sud, la forêt amazonienne est quasi vide. Ainsi sur plusieurs milliers de kilomètres les échanges des rares populations amérindiennes surtout sont strictement locaux et ne tiennent pas compte de la frontière. Pour le contact Venezuela / Brésil on trouve deux postes, un à Cucui sur le Rio Negro à l’Ouest et un à Boa Vista sur le Rio Branco (il existe un avant poste entre la ligne elle-même et la ville), avec la particularité d’être à 220 kms de la ligne de démarcation.
Schéma n° 1 : La matérialité de la frontière
 
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Auteurs : M. Bégot, AREC, F. Turbout, MRSH, Université de Caen Normandie, 2018

 

Enfin, à l’Est on trouve un poste frontière à Saint Georges de l’Oyapock en Guyane Française qui présente la singularité d'avoir un pont gardé par des gendarmes et des douaniers et dont la liaison avec la ville brésilienne de Oyapoque vient d’être inaugurée 6 ans après la fin des travaux. Ce poste frontière marque une ouverture dont les édiles municipaux attendent beaucoup pour le développement de la cité aujourd’hui regroupant 3 300 habitants. Mais cette ouverture ne va-t-elle pas provoquer un afflux massifs de population comme on peut l’observer sur le Maroni, limite entre la Guyane et le Surinam. Dans ces zones de forêts denses qui ne connaissent que les cours d’eau comme réseaux de communication le contrôle des territoires est une gageure.

3.3. Les effets Frontière

« Les cols et les rivières peuvent devenir des supports de frontières mais pour les habitants de la région, elles représentent plus des "lieux de contacts et d’échanges que des séparations", Anne-Laure Amilhat Szary.

  • Dans le paysage : l’architecture reflète la présence de la frontière par des caractéristiques particulières comme les bâtiments militaires, zones dans lesquelles on effectue les opérations de passage de personnes ou marchandises. On peut aussi rencontrer des casernes, sur la ligne elle-même ou à proximité, rarement plus loin comme au Mexique qui a crée des barrages plus ou moins mobiles dans l’isthme de Tehuantepec constitués de la police fédérale, de l’Institut National des Migrations, des Douanes et de l’Armée ou à Boa Vista déjà citée. Dans l’isthme la plupart du temps les bâtiments officiels sont sommaires et peu importants. Selon les cas on retrouvera des marchés, des magasins qui offrent des produits détaxés et quelquefois des zones d’entrepôts ; elles sont nombreuses le long de la ligne entre les États-Unis et le Mexique. Quelques gares routières embarquent et débarquent des passagers habitant la région et spécimens rares, des touristes à allure de « globe-trotteurs ».
  • L’intensification des échanges dus le plus souvent à des différentiels de niveaux de vie. Cela est remarquable dans le Nord de la zone, les habitants des États-Unis, bénéficiant d’une monnaie forte qui leur assure de nombreux achats dans les grands centres commerciaux de Tijuana, Nuevo Laredo ou Matamoro, sur les marchés qui proposent des productions artisanales. C’est aussi avantageux pour les travailleurs mexicains journaliers qui passent la frontière quotidiennement ; rémunérés en dollars, même si les salaires sont peu élevés, le change leur est favorable et leur permet d’assurer un mieux être à leur famille. À l’heure actuelle, beaucoup sont inquiets et craignent des mesures encore plus coercitives de la part de l’administration du président Trump.

Cela est encore vrai quand la frontière exacerbe les difficultés politiques dans un pays. La ville de Cucuta en Colombie est celle de tous les trafics : sur la monnaie (change informel entre le bolivar et le peso colombien), revente de produits de première nécessité comme le riz, les haricots, l’huile, le sucre le lait et les médicaments, encadrés au Venezuela, acquis frauduleusement et accentuant la pénurie et revendus plus chers à Cucuta tout en restant sous le niveau des prix colombiens. Les fraudeurs sont connus et s’activent presque au grand jour. Les sommes collectées sont importantes. Des systèmes de fonctionnement, à un degré moindre s’observent sur les rives du Maroni ou de l’Oyapock en Guyane ou de la République Dominicaine et de Haïti. Les transits informels entre le Guatemala et le Mexique, malgré les efforts des États n’a pu disparaître car des productions alimentaires passent de la rive sud au nord et sont une nécessité pour les populations locales. Les autorités des deux pays ont du négocier avec les passeurs, les commerçants, …et les élus locaux. Enfin, les limites territoriales sont les lieux de transits de la drogue passée aux mains des narco trafiquants mexicains ; ils ont des relais dans tout l’isthme du Bouchon de Darien au nord du Mexique. Ils contribuent à accentuer la violence dans tous les pays.

3.4. Quels sens la frontière peut-elle avoir dans la Caraïbe ?

Pour un Mexicain des États du Sonora, du Chihuahua, ou du Tamaulipan, la frontière ce sont des tracasseries administratives, de longues files d’attentes aux postes de police et de douane, des contrôles toujours plus pointilleux.

Pour un habitant de l’archipel, la frontière, c’est la ligne jaune devant la guérite du policier à l’aéroport ou dans une gare maritime, c’est ensuite une salle d’embarquement où dominent les uniformes du pays que l’on vient pourtant de quitter. C’est encore une ligne jaune devant une guérite semblable et différente après un voyage de une à plusieurs heures.

Pour un plaisancier qui quitte une île, c’est le port, une masse liquide uniforme et un port de l’autre côté un bâtiment dans lequel il effectue sa déclaration d’arrivée et donne la liste des passagers à bord.

Pour un habitant de l’Amazonie, c’est une construction dans laquelle se règlent quelques problèmes, mais qui n’influent pas sur la vie quotidienne On passe à côté, on évite soigneusement les représentants de l’autorité. Ce sont des déplacements sur les cours d’eau, un environnement forestier dense sur 200 à 300 kms parfois la rencontre de militaires, rarement ou encore un drapeau sur un pilier.

Pour un résident autochtone des régions orientales de l’isthme c’est une vaste étendue de mangroves, un labyrinthe aqueux, une rencontre avec un comparse qui parle la même langue

( le mosquitos ) ou des « étrangers » de part et d’autre d’un cours d’eau qui parle une autre langue entre eux, le castillan.

Dans l’ensemble de l’isthme, en Amazonie, la frontière pour les populations qui y vivent n’a pas beaucoup de sens, y compris sur les territoires les plus urbanisés.

Les groupes amérindiens du Guatemala, du Honduras, du Nicaragua de la forêt brésilienne ou vénézuélienne, s’agglutinent le long des fleuves, ont un quotidien proche de celui de leurs ancêtres quand bien même la radio ou la télévision animent pour les courtes périodes où l’électricité est disponible les soirées dans les villages ; on cultive la terre, on pêche, on vend, on se ravitaille où c’est possible, on se déplace sans savoir où se trouve la limite entre deux états et quand on le sait on n’en tient guère compte. Un sociologue canadien Jean Clot a étudié le cas des villes frontières de Coatepeque et Hidalgo entre le Guatemala et le Mexique à l’Ouest. Un pont a été construit pour faciliter les déplacements, les échanges, les contrôles. Mais les habitants, civils ordinaires comme fonctionnaires préfèrent utiliser les services des « passeurs  informels » d’une rive à l’autre sur des embarcations faites de chambres à air de camions ou de tracteurs et de planches ou de morceaux de tôle. Le pont est là, les contrôles sont faits …parfois, mais à quelques mètres sur plusieurs kilomètres les déplacements perdurent comme autrefois. Cet exemple se situe sur une des lignes les plus surveillées de la Région.

Photo 4 : Passeurs informels sur le fleuve Suchiate, frontière naturelle entre le Mexique et le Guatemala

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Source : El espectador, 2018

Les frontières, par définition, sont des lignes à la fois intangibles et mouvantes. Elles appartiennent à deux entités, aux constructions, aux institutions, aux cultures qui s’individualisent voire s’opposent au fil du temps quand bien même la matrice a été commune. Leur tracé est le témoignage de la puissance de l’un ou l’autre des états. Quand un des deux est beaucoup plus puissant que l’autre, il impose sa vision du monde mais aussi de la frontière.

Dans la Région Caraïbe, le cas des États-Unis est des plus symboliques. Ils contraignent le Mexique à « vivre » la frontière selon leurs règles : limitations des passages, contrôles, reflux de non résidents ; et pourtant malgré cet arsenal militaire, policier, administratif ou juridique quels sont ceux qui l’ont emporté ? La langue espagnole fait jeu égal avec l’anglais en Californie, au Nouveau Mexique ou au Texas ; les cultures (musique, danses, arts gastronomie) se mélangent, s’interpénètrent et créent de la nouveauté. Tout dirigeant quel qu’il soit doit prendre en compte le poids des électeurs « latinos ».

Les limites révèlent parfois la peur de l’autre comme dans le cas des rapports de la République Dominicaine avec son voisin Haïti. Celle-là chasse les Haïtiens de son territoire qui continuent pourtant à venir s’y installer et travailler. Les élites dominicaines malgré des positions ethnicistes parfois racistes, ne peuvent se passer de leurs voisins qui occupent des emplois dans des secteurs entiers de l’économie. La frontière est étanche dans la volonté politique et poreuse dans sa réalité géographique comme dans l’acceptation des contraintes économiques.

Elles sont aussi occasionnellement, le résultat de négociations pacifiques dans l’intérêt bien compris de toutes les parties pour un partage des ressources marines dans le Golfe de Fonseca entre Salvador, Guatemala et Honduras en 2012 et dans le cas de l’exploitation des réserves sous-marines du gisement de Loran Manatee entre Trinidad et le Venezuela en mars 2017 dans le Golfe de Paria.

Enfin, les frontières sont l’horizon ouvert ou fermé derrière lequel un nombre toujours plus grand d’individus croit discerner « l’Eldorado ». L’eldorado pour un Mexicain c’est un travail souvent mal payé dans un supermarché, un fast food, une exploitation agricole californienne ou texane. C’est Maracaïbo et ses champs pétrolifères pour un Colombien qui y trouve un emploi ; c’est Cucuta en Colombie pour un Vénézuelien qui trouve à des prix dix fois plus élevés les produits qui ont quitté frauduleusement son pays mais dont il a terriblement besoin. C’est toujours le quasi esclavage dans des champs aurifères légaux ou illégaux de Guyane pour un Brésilien ou pour les Haïtiens des bateys de République Dominicaine dans les grandes exploitations cannières, et parfois pour un habitant de Sainte-Lucie ou de la Dominique après avoir affronté les canaux maritimes, un médecin ou un hôpital dans lesquels quelques soins peuvent être gratuits. Pour tous la frontière c’est cette ligne, cette zone qui offre ou empêche d’accéder à une vie plus sûre.

 

 

Bibliographie

 

Anne-Laure Amilhat Szary, Murs et Barrières de sécurité : pourquoi démarquer les frontières dans un monde dématérialisé. Interview dans le journal Libération du 3 juillet 2015.

Jean Clot, 2016, Marges et frontières entre le Mexique et le Guatemala, Note de Recherche, février 2016, Observatoire des Amériques, Montréal.

Régis Debray, 2013, Éloge des Frontières, Ed.Gallimard, Paris, 90 p.

Michel Foucher, 1994, Fronts et Frontières, un tour du monde géopolitique, Ed. Fayard, Paris, 200 p.

Serge Gruzinski, 2012, L’Aigle et le Dragon, Démesure européenne et mondialisation au XVIe siècle, Ed. Fayard, Paris, 350 p.

Peter Sahlins, 1996, Frontières et Identités nationales, la France et l'Espagne dans les Pyrénées, depuis le XVIIe siècle, Belin, Paris, 450 p.

 

1Peter Sahlins, 1996, La France et l’Espagne dans les Pyrénées depuis le XVIIe siècle, Belin, Paris. Si l’on examine le cas d’une frontière en apparence facile à délimiter, on s’aperçoit que la France et l’Espagne ont mis deux siècles pour arriver au statut quo actuel : 1659 Traité des Pyrénées, 1868 Traité de Bayonne. Pour l’isthme centra américain et le nord de l’Amérique du Sud il n’y a donc rien de surprenant à voir des tracés encore contestés.

2 Dans l’archipel, où pourtant l’élimination des populations autochtones a été plus rapide, plus complète, le cas des Kallinagos de l’île de la Dominique est lui aussi exemplaire : leur lutte avec des phases d’accalmie a duré 130 ans.

3 Aujourd’hui, les états cherchent à effectuer des recensements exhaustifs de ces populations Le Venezuela a dénombré 28 ethnies (ex Jivi, Penion, Warao, Yanomanis entre autres) et en 1991 Caracas a modifié sa constitution afin de reconnaître les droits de ces populations.

4C’était pourtant en 2016 une des voies les plus empruntées par les migrants caribéens voire même par des Africains, ce qui n’est pas la route la plus directe pour rejoindre les États-Unis.

Auteurs : Monique Bégot, Frédérique Turbout

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